Avec « Les Matins Mauves », Oaks amorce une mue spectaculaire par le biais de son second album sorti le 27 Avril 2018. Avec ses chansons en français, le disque aborde des rivages différents. Ce changement de langue signifie un changement d’univers perceptible dès les premières notes de l’ouvrage pop. « J’avais envie d’écrire en français » explique le chanteur Pierre Welsh pour justifier cette nouvelle perspective.
« J’avais déjà écrit dans ma langue avant le premier album, avant d’hésiter à mélanger les deux approches ». Ce passage à la langue d’Etienne Daho permet aux textes de s’avouer plus franchement personnels. « Quand on chante en anglais, on est plus protégé » explique Pierre, conscient d’avancer plus à découvert que d’ordinaire sur ses textes.
Si l’énergie de Oaks reste résolument tournée vers le rock et la pop, le groupe a réussi à incorporer des arrangements moins classiques, qui passent par l’utilisation de grooves différents. Un travail minutieux qui fait appel à un nouveau fonctionnement. Si le travail de composition demeure une aventure collective, le développement des mélodies et des rythmiques contourne la pulsation ordinaire du guitare-basse-batterie pour privilégier des textures originales. Si la ligne de conduite de Oaks a changé, la méthode demeure la même : un travail exigeant de mises au point d’idées partagées collectivement, qui privilégie les échanges nourris.
Sans jamais verser dans le rock français ni pour autant tomber dans les tics de la pop locale actuelle, Oaks met au point une formule à mi-chemin entre la narration hors norme d’un Bashung et les textures savantes du duo Air. « On a cherché à mettre en place des boucles rythmiques à partir desquelles certains morceaux ont vu le jour. » explique Pierre.
Les tempos sont plus alanguis, l’urgence rock des débuts a cédé la place à des climats plus introspectifs ; une progression naturelle qui inclut les outils du hip hop et de l’électro pour mieux circonscrire une voix encore mieux domestiquée. Avec ce qu’il faut d’audaces peaufinées dans le cadre du studio, de faux départs et de changements de cap pour faire de la conception de ce disque une épopée. A la réalisation, Fabien Tessier signe une partition qui met en avant les contributions des musiciens (basse, batterie, guitare et chant-guitare) pour aboutir à une synthèse séduisante.
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Olivier NUC
Journaliste au Figaro